RDC: entre pollution et essor économique, le paradoxe de l’exploitation des ressources minières
En République démocratique du Congo, la production minière notamment du cuivre et du cobalt connaît un accroissement ces 5 dernières années. Celle du cuivre a doublé alors que la production du cobalt tend à dépasser les 100 000 tonnes. Avec une contribution significative de 43 % au budget national, le secteur minier reste le pilier de l’économie de la RDC. Cependant, le rythme de l'exploitation minière dans la région du Katanga inquiète tant les chercheurs que les acteurs de la société civile. Les conséquences sur l’environnement sont de plus en plus dévastatrices.
De notre correspondante à Lubumbashi.
La transition énergétique pousse les entreprises minières installées en RDC à accroître leur production. Entre 2018 et 2022, la production de cuivre par exemple a doublé. Elle est passée d’un million de tonnes à deux millions. Celle du cobalt était de plus de 90 000 tonnes en 2022. Il y a cinq ans, elle avait dépassé la barre des 100 000 tonnes. Banza Lubaba est professeur à l'université de Lubumbashi et chercheur sur les questions de l'environnement.
« Beaucoup d'investisseurs du secteur minier ont mobilisé des fonds pour accroître la production de cobalt et d'autres minerais. Le rythme s’est accru depuis 2016. Pour la production de cobalt par exemple, on l’estime à 3,95 kilos à chaque seconde, ce qui représente environ 145 000 tonnes par an. »
Ce rythme d’exploitation minière inquiète les acteurs de la société civile à Kolwezi. En plus d’impacts environnementaux sur l’air, le sol ou la végétation, l’activité minière menace la nappe phréatique. À chaque fois que l’exploitation arrive à une nappe, l’entreprise doit vider l'eau pour éviter que la mine ne soit noyée. Pendant ce temps, les ressources en eau s’épuisent, explique Shadrak Mukad, cadre de la société civile à Kolwezi : « Aujourd’hui, dans les quartiers Musonoi et le centre-ville de Kolwezi, pour atteindre l’eau lors d’un forage, il faut aller à 100 voire 150 mètres de profondeur à certains endroits. Ça nous inquiète davantage car la Regideso dans la ville de Kolwezi n’est pas en mesure de desservir toute la population. »
La RDC ne peut cependant pas se permettre d’arrêter l’activité minière dans cette région. Grâce au cobalt de Kolwezi, le pays est 2ème producteur mondial de ce minerai stratégique. En outre, le secteur minier représente 47% du PIB et génère 95% des exportations et 25% d’emplois. Freddy Kasongo est directeur de l’Observatoire des ressources naturelles, OARSE : « À titre indicatif, la contribution du secteur minier à l’économie nationale pour les années 2020 et 2021 était de 5,8 milliards de dollars. Il faudrait y ajouter son impact sur le revenu de la douane, de la sous-traitance, du tourisme… Il est plutôt urgent d’utiliser ces ressources pour le développement d’une économie alternative au secteur minier car on sait que les mines sont épuisables. »
Devant ce paradoxe, les chercheurs et les acteurs de la société civile appellent l’État congolais à rationaliser l’exploitation minière pour éviter que le pays ne soit avalé par ses mines.
Cet article a été publié sur RFI.