Tchad: le défi du recensement des réfugiés soudanais à leur arrivée
Plusieurs dizaines de milliers de civils soudanais ont fui les combats pour trouver refuge dans les pays voisins, dont le Tchad, qui accueille déjà plus de 400 000 Soudanais arrivés depuis la guerre du Darfour débutée en 2003. Les nouveaux arrivants se concentrent dans le village frontalier de Koufroun. Le gouvernement et les ONG tentent de les recenser, mais pour ceux qui ont perdu leurs documents d'identité, il faut s'armer de patience avant d'obtenir une aide alimentaire. Le secrétaire général de l'ONU a appelé à redoubler d'efforts pour une solution pacifique au Soudan. Antonio Guterres craint des répercussions du conflit sur la sécurité régionale.
Koufroun n’était qu’un petit hameau. Il s'est transformé camp de fortune qui s’étend à vue d’œil, peuplé de plus de 20 000 réfugiés soudanais, selon le HCR.
Chargée de quelques bagages et de souvenirs douloureux, Zenab Adam Hassan a perdu deux parents proches. « Ils nous ont attaqués, ils ont brûlé nos maisons, on ne pouvait rien faire, on n’a rien pu sauver, pas même nos papiers. Chacun a pris ses enfants et s’est mis à courir pour s’enfuir le plus loin possible. »
Arrivée depuis une semaine, Zenab Adam n’a pas encore le précieux bracelet qui permet de recevoir l’aide alimentaire… Un enfant sous chaque bras, les six autres à sa suite. Elle part à la rencontre d’Abdelmoumine Malhafiss, chargé de recensement pour la Croix-Rouge tchadienne et la Commission nationale des réfugiés. « Elle dit que sa maison a été brûlée, elle a même tout perdu, ses documents de référence, mais ce que je lui propose, c’est de patienter. Après avoir fini avec les gens qui ont des documents de référence, on essaiera de revoir son cas aussi », indique l'employé de la Croix-Rouge tchadienne.
« Nous ne sommes qu’au début de la crise »
« Une bonne partie des personnes qui sont attaquées à l’intérieur du Soudan ne peuvent pas nécessairement avoir la possibilité de quitter les zones où elles se trouvent, explique Brice Degla, coordinateur des urgences au HCR. Donc, je pense que nous ne sommes qu’au début de la crise, et que nous pourrons avoir des afflux plus importants les jours à venir. »
Koufroun concentre l’essentiel des réfugiés, mais des arrivées sont également signalées tout au long de la frontière.
Guterres craint des répercussions du conflit sur la sécurité régionale
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé mercredi redoubler d'efforts pour trouver une solution pacifique à la crise au Soudan, pays qui « ne peut se permettre une lutte pour le pouvoir entre deux personnes ». « Un pays comme le Soudan, qui a tant souffert, qui se trouve dans une situation économique et humanitaire aussi désespérée, ne peut se permettre une lutte pour le pouvoir entre deux personnes », a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse dans la capitale kényane, Nairobi.
J'aimerais vous dire que je suis confiant, mais en réalité, j’espère. Malheureusement, la situation actuelle échappe à tout contrôle. L'aide humanitaire doit être accessible. Et j'espère que cela sera le cas, mais je ne suis pas encore confiant. Nous avons une nouvelle annonce de cessez-le-feu, grâce à l’intervention du Soudan du Sud, manifestement, et je soutiens cette initiative, mais malheureusement, jusqu'à présent, aucun cessez-le-feu annoncé n’a duré. Je pense donc qu'il est important que toute la communauté internationale dise clairement aux deux généraux, ainsi qu’à tous ceux qui profitent de la situation, qu’elle totalement inacceptable, qu'un cessez-le-feu durable doit être mis en place, qu'un dialogue politique doit être établi et qu'une transition vers un gouvernement civil doit être garantie. Malheureusement, nous n'en sommes pas encore là.
Les combats doivent cesser, et ce, avant que plus de gens ne meurent et que ce conflit ne dégénère en une guerre totale qui pourrait affecter la région pour les années à venir. Je suis très inquiet, à commencer par le Tchad. L'épicentre de ce conflit est encore dans une certaine mesure le Darfour, indépendamment de ce qui se passe à Khartoum. Le Tchad est un pays en transition démocratique et il a été menacé, comme vous le savez, par des milices présentes en Libye. Il est absolument essentiel de soutenir le Tchad dans la situation actuelle. D'autres pays de la région sont engagés dans leur propre processus de paix. L'Éthiopie est engagée dans un processus de paix et il est essentiel d'éviter tout débordement du conflit au Soudan sur l'Éthiopie. Le Sud-Soudan est aussi engagé dans un processus lent et difficile de mise en œuvre d'un accord de paix, tout débordement du conflit soudanais sur le Sud-Soudan serait extrêmement dangereux
Cet article a été publié sur RFI.